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Payer pour être édité ?

Que faire quand on a écrit un livre qu’on souhaite publier et qui ne trouve pas preneur auprès des éditeurs " normaux ", c’est-à-dire des éditeurs à compte d’éditeurs qui assument tous les frais et les risques de la publication ? 
 
C’est une question fort délicate – abordée largement dans mon livre Manuel pratique pour les auteurs – sur laquelle je vais essayer de faire le point à votre attention, et ce d’autant qu’en marge de mon site, vous aurez sans doute remarqué des publicités faites par des maisons d’édition dont vous constaterez que la plupart demandent, sous une forme ou une autre, une participation pécuniaire de la part des auteurs. Je vous dirai plus loin ce qu’on peut penser de ces dernières. 
 
Après tout, quand une personne a écrit un livre dont elle croit sincèrement qu’il peut intéresser au moins une certaine catégorie de clientèle et quand elle ne parvient pas à trouver un éditeur " normal " (c’est par ce terme que je désignerai tout éditeur à compte d’éditeur), il n’est pas a priori aberrant de se dire : je suis prêt à investir dans mon œuvre et à en financer la publication. 
 
Pourquoi pas ? Mais avant d’aller plus loin, il faut commencer par rappeler le déroulement normal du circuit de publication à compte d’éditeur : 
 
- 1er stade : l’éditeur fait imprimer votre livre en un certain nombre d’exemplaires, 
 
- 2ème stade : votre livre est diffusé dans un certain nombre de librairies et de grandes surfaces spécialisées (genre FNAC ou Virgin) 
 
- 3ème stade (parallèle au second) : votre livre fait l’objet d’une promotion auprès des médias et via leur intermédiaire. 
 
Déjà, au 1er stade, selon que vous serez publié chez un grand, moyen ou petit éditeur, les choses seront différentes, ne serait-ce qu’en fonction du volume du tirage initial : rappelons par exemple, que, pour être référencé sur Electre, qui est la base de données de l’ensemble des libraires français, il faut un tirage minimal de 500 exemplaires. D’une manière générale, plus ce tirage initial est important, plus votre éditeur croit aux chances de succès et plus il se " décarcassera " pour assurer ce dernier. 
 
C’est au niveau du second et du troisième stades que le " poids " et l’importance de l’éditeur vont tenir un rôle déterminant. En effet, il est clair que les libraires et, notamment, les grandes surfaces de livres, vont accorder davantage de place dans leurs rayons à des livres provenant de grands éditeurs. Pourquoi ? D’abord parce que ces derniers sont ceux qui font le plus de " pressing " en faveur de leurs poulains, ensuite parce que, en fonction de la notoriété de ces grandes maisons d’édition, les commerçants s’attendent à ce que leurs livres se vendent bien. Il faut se mettre à leur place : business is business ! En revanche, les petits éditeurs, moins bien ou mal représentés et peu connus, se verront réduits à la portion congrue... 
 
Ajoutons, concernant le 2ème stade, que les éditeurs, même grands, ont assez peu d’influence sur la manière dont les grandes surfaces vont concrètement présenter les livres dans les rayons. Or cette présentation est de prime importance. Qu’est-ce qui se vendra mieux : un livre en piles bien exposées dans le magasin et dont la couverture est en évidence ou un livre exilé dans un rayon et dont on ne voit que le dos ? Le premier, bien sûr… Et il y a fort à parier que les livres des petits éditeurs, s’ils sont présents, ne seront pas ceux qui seront les plus favorisés. Je connais un auteur qui n'hésite pas à passer du temps pour se rendre dans les surfaces de vente près de chez lui et à discrètement déplacer ses livres afin qu'ils soient mieux exposés aux regards des clients potentiels !  
Enfin, il y a la promotion auprès des médias. Là aussi, pour un auteur, paraître chez un éditeur de poids, est un avantage. Certes, tous les auteurs ne sont pas traités à la même enseigne; Ainsi, il est clair que, par la force des choses, un grand éditeur établira une hiérarchie quant à ses propres publications et en " poussera " certaines plus que d’autres. Par ailleurs, le rôle des attachées de presse (c’est une profession très féminisée) est capital. Je peux témoigner que ceux de mes propres livres qui en ont bénéficié sont ceux qui ont le mieux " marché "… alors même que ce n’étaient pas forcément les meilleurs. Et là aussi, qui a le moyen de se payer les services d'une attachée de presse ? 
 
A contrario, le petit éditeur aura bien du mal à se faire une place au soleil : les journalistes des médias, écrits ou radiophoniques et télévisés ont une tendance naturelle à favoriser les éditeurs très connus. Sans médire de personne, il ne faut pas oublier que ces journalistes sont fréquemment eux-mêmes des auteurs – au moins potentiels – et il est compréhensible qu’ils aient tendance à favoriser les éditeurs chez qui ils espèrent publier un jour ou ont déjà publié dans le passé. Le copinage est une réalité de la vie… 
 
Bref, pour résumer, en prenant une image empruntée au monde du football, on peut dire que les auteurs parus chez un petit éditeur se retrouvent en Deuxième division, voire en Nationale. Certes, il arrive qu’une équipe de deuxième division connaisse le succès en Coupe de France ou dans la Coupe de la ligue. Mais c’est exceptionnel. Il ne faut donc pas rêver… du moins pas trop. 
 
Revenons donc à l’auteur qui n’a pas eu la chance de trouver un éditeur " normal ", grand ou petit, et qui est prêt à investir dans son propre livre. 
 
Sur mon site, il existe déjà une rubrique relative à l’auto-édition. Ici, on va simplement, à la lumière de ce qui précède, imaginer le parcours du combattant qui attend un auteur qui se lance dans une telle aventure. À moins qu’il ou elle ne soit une personne connue, que va-t-il se passer ? Elle va payer un imprimeur pour façonner son livre et va se retrouver avec un stock à écouler. Croyez-vous que cet auteur va être accueilli à bras ouverts par les libraires ? Sauf exception – et ne parlons pas des grandes surfaces ! – la réponse est rarement positive. Quant à la promotion, la situation est similaire. Imaginez un illustre inconnu démarchant les journalistes… Là aussi, de manière générale – et il faut admettre que cette attitude des professionnels de l’information est compréhensible, car ils sont très sollicités – , il risque fort de n’avoir qu’un succès d’estime ! 
 
Autrement dit, que ce soit pour la diffusion ou la promotion de son livre, même s’il déploie des efforts hors du commun - ce qui suppose qu’il ait, par ailleurs beaucoup de temps à consacrer à cette activité – les résultats risquent d’être décevants. Pour l’auteur, il n’est plus question ici de jouer en Deuxième division ni même en Nationale : il se retrouve carrément en Division d’honneur ! 
Et s’il paye un éditeur pour publier son livre, sera-t-il mieux loti ? That is the question… 
 
Idéalement, qu’est-ce que désirerait l’auteur prêt à investir son propre argent ? D’abord, pour le plus petit prix possible, voir son livre édité en suffisamment d’exemplaires ; ensuite voir l’éditeur assurer la diffusion et la promotion de son livre. Simple, n’est-ce pas ! 
 
Certes. Mais qu’en est-il dans les faits ? Sur son chemin se dressent pas mal d’obstacles, voire des " pièges ". 
 
D’abord, au niveau de l’éditeur, il y a plusieurs manières de " payer " un éditeur. 
 
D’une part, il y a des éditeurs qui se présentent comme des éditeurs " normaux " (ce qui veut dire que vous leur cédez vos droits sur votre œuvre et qu’ils vous rémunéreront par des droits d’auteur sur les exemplaires vendus), mais demandent, sous une forme ou une autre, une participation aux frais. Dans bien des cas, chez ces éditeurs qu'on appelle aussi "participatifs", cette dernière peut être excessive. Le moyen de s’en rendre compte est de faire un simple calcul : compte tenu des droits d’auteurs, combien faudrait il de ventes pour au moins rentrer dans ses frais ? Ensuite, il faut se poser la question : est-ce qu’il est réaliste d’espérer un tel chiffre de ventes ? Et ne vous bercez pas d’illusions : sachez que, même chez de grands éditeurs, le livre d’un auteur débutant ne dépasse fréquemment pas la barre des 1000 exemplaires vendus ! En, ce qui vous concerne, comptez, au maximum sur quelques petites centaines. 
 
D'autre part, il y a des éditeurs à compte d’auteur. Dans ce cas, le même type de calcul que précédemment peut et doit être effectué 
 
La publication à compte d’auteur qu’est-ce que c’est ? Juridiquement, ce type de publication est couvert par l’article L.132-2 du CPI (Code de la propriété intellectuelle). En clair, c’est vous qui assumez les risques financiers de la publication. 
 
En échange, vous devez conserver tous vos droits sur votre œuvre (sinon, vous avez affaire – cela arrive – à un éditeur à compte d’auteur abusif qui se place dans l’illégalité ) et êtes propriétaire de l’ensemble des exemplaires tirés. Vous êtes donc rémunérés directement sur les ventes. Comme parmi les éditeurs participatifs, chez les éditeurs à compte d’auteurs, on rencontre de tout. 
 
Un des pièges les plus courants est de se laisser aller à tirer un nombre d’exemplaires trop important : certains éditeurs de ce type – pas tous heureusement ! – ne s’intéressent qu’à une chose : la taille de votre portefeuille et n’ont qu’un objectif : la réduire ! 
 
Il faut aussi savoir que nombre de ces éditeurs offrent des prestations réduites. Certains se contentent de faire imprimer vos livres et de vous les livrer. À vous de vous débrouiller – cf. ci-dessus – pour la diffusion et la promotion. D’autres affirment se charger de la diffusion et de la promotion : il faut alors voir dans le détail de quoi il retourne. Par exemple, une diffusion/promotion via le site Internet de l’éditeur risque fort de se révéler décevante. Dans le passé, existait une organisation, le CALCRE, dont le nom même était un programme : Comité des auteurs en lutte contre le racket des éditeurs ! Elle publiait un annuaire (Audace) dans lequel elle accordait des étoiles à quelques rares éditeurs à compte d’auteur. Bien qu'ayant des démêlés judiciaires, le site internet existe encore et les rubriques de conseils aux auteurs restent accessibles CALCRE !  
 
 
Le problème pour l’auteur est que, même s’il trouve une bonne maison d’édition à compte d’auteur, il a toutes les chances de jouer en Division d’Honneur et les perspectives de montée dans les divisions supérieures sont minces. Pourquoi ? Parce que l’édition à compte d’auteur a une mauvaise image de marque. Nombre de libraires et presque tous les journalistes des médias se refusent à présenter les livres d’auteurs publiés de cette manière. C’est peut-être injuste, ce n’est heureusement pas toujours vrai, mais c’est, là aussi, une réalité incontournable dont il faut tenir compte… 
 
Quel conseil vous donner ? Celui que je vous donne dans mon livre Manuel pratique pour les auteurs (un petit peu de " pub " au passage !) : ne pas vous décourager face aux multiples refus rencontrés et persister. Ce n’est pas agréable. Ce n’est pas facile, c’est même frustrant, mais il faut insister et continuer de contacter de nouveaux éditeurs : certains de mes livres n’ont trouvé leur éditeur qu’après de nombreuses dizaines (presque une centaine !) de refus. Cela étant, je conçois qu’on puisse se lasser (ou ne pas avoir le temps), auquel cas payer pour être publié est une possibilité… à condition d’être très prudent et – c’est un préalable essentiel – de savoir exactement ce que vous en attendez : ce n’est pas la même chose de diffuser à quelques dizaines d’exemplaires ou à plusieurs centaines. Surtout, n’ayez pas les yeux plus gros que le ventre ! Un tirage initial de 100 à 200 ou 300 exemplaires, pour ainsi dire, " pour voir ", est sans doute adapté. Certes 500 exemplaires ouvrent davantage de portes (Electre), mais cela peut être un peu ambitieux pour un premier essai…À vous de voir : c'est vous qui payez ! 
 
Pour terminer – après tout, c’est, au départ, pour cette raison que je me suis lancé dans ce très long développement – que penser des éditeurs payants dont vous avez sans doute vu les pubs en marge de mon site? 
 
Il n’est pas facile de répondre, mais je vais quand même essayer. 
 
Vous distinguerez deux types d’éditeurs : ceux qui, spontanément, sur leurs sites Internet annoncent clairement leurs tarifs détaillés ou, au moins, donnent des indications ou des exemples chiffrés et ceux qui n’en donnent pas. Personnellement, j’aurais d’instinct tendance à préférer les premiers. 
 
Concernant les seconds, j’ai fait quelque chose de simple : je leur ai adressé un e-mail en leur demandant des informations sur leurs prestations. Certains ne m’ont pas répondu du tout et, de ce fait, je ne peux que les déconseiller : c’est, du moins pour l’instant, le cas en particulier de la Société des écrivains. Parmi ceux qui ont répondu, les éditions Bénevent n'ont fourni aucune des données chiffrées demandées, ce qui n'est a priori pas bon signe. En revanche, la réponse des éditions Almathée a été nettement plus précise : cet éditeur donne au moins l’impression de croire en ce qu’il fait. Je cite ainsi une partie de la réponse de son Directeur, Jean-Yves Normant : " Nous versons 25 pour cent du prix de vente sur le premier mille. En moyenne l'auteur rentre dans ses frais vers 600-700 exemplaires vendus. Il arrive régulièrement que ce chiffre de ventes ne soit pas atteint et alors l'auteur perd de l'argent. Je crois que le point de vue de l'auteur doit être à peu près le suivant : "je me fais plaisir (c'est autorisé !), dépenser 2000-2300 euros ne me gêne pas beaucoup, j'ai un peu de temps et d'énergie à consacrer à la promotion de mon livre, je ne me fais pas d'illusions quant aux ventes". A partir de là il n'y a pas de problème et chacun s'y retrouve. J'ajoute, ce qui n'engage que moi, que je ne suis pas d'accord avec ceux qui prétendent que publier un livre est avant tout une marque d'orgueil. Ainsi, ceux qui publient en payant (vanity publishing !) seraient tous des orgueilleux qui voudraient absolument, envers et contre tout, publier leur livre. S'il est vrai que l'orgueil joue parfois un rôle, la volonté de publier un livre dépasse en général de beaucoup ce sentiment somme toute assez primaire. Publier, c'est beaucoup plus que simplement le plaisir de voir son nom sur une couverture." 
 
Pour ce qui est des éditeurs de la première catégorie, vous pourrez tirer aisément vos propres conclusions vous-mêmes en visitant leurs sites et en analysant leurs propositions chiffrées et leurs prestations.  
Cela étant, la vérité d'un jour n'est pas forcément celle de la veille. J'avais ainsi repéré un micro-éditeur qui faisait oeuvre utile avec un site très bien fait dont le contenu très détaillé expliquait des tas de choses relatives à l’édition. Parallèlement, il y annonçait clairement la couleur sur le coût des prestations. Hélas, au printemps 2006, patatras, ce n'était plus le cas et je redoutais le pire... Certes, fin 2008, il m'a envoyé un mail pour me signaler avoir amélioré les choses en présentant en ligne le texte de son contrat d'édition "normal" à compte d'éditeur et en donnant une fourchette de prix pour la partie impression payante à la demande de ses activités. Comme c'est exact, je ne cite donc plus son nom puisqu'il n'y a aucune raison de lui faire une "publicité" négative - non plus que positive d'ailleurs - par rapport aux autres prestataires payants.  
Dans le même esprit, méfiez-vous aussi si un éditeur dont le mom vous est inconnu annonce un concours pour des romans (par exemple policiers): il est à craindre que ce ne soit là qu'une manoeuvre visant à se constituer un fichier de clients potentiels à qui proposer une publication moyennant finances... En 2006, par exemple, Publibook a procédé de cette manière.  
Voilà ce que je peux vous dire sur un sujet tellement vaste qu’il mériterait un livre à lui seul ! Si vous avez des commentaires ou des informations complémentaires à apporter, n’hésitez pas en m’en faire part ! 
 

 

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Modifié en dernier lieu le 29.09.2020
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